
Paru en France en 1992
La Culture est considérée à
juste titre comme l’une des séries SF les plus représentative de l’utopie. Banks
y décrit une civilisation parfaite où ni monnaie, ni travail ni crimes
n’existent plus. Les humains vivent à travers planètes et gigantesques
vaisseaux habitats, aidés par une technologie surpuissante et des intelligences
artificielles sous formes de drones.
Une société de loisirs qui se
veut bienveillante, non sans une certaine condescendance envers les autres
espèces, vues comme inférieures et barbares, et qu’elle absorbe à l’occasion.
Dans l’homme des jeux, Banks
nous invite à suivre Gurgeh, champion de jeux de plateau et lui-même créateur
de jeux. Après avoir triché pour gagner, alors même que ce n’était pas
nécessaire, il se trouve en échange de son secret poussé par la Section Contact
de la Culture à participer à jeu contre un peuple extraterrestre, les Azadiens.
Pour ces derniers le jeu d’Azad est si important qu’il détermine la place de
chacun dans la société, jusqu’à la fonction même d’Empereur.
Le peuple auquel Gurgeh est
confronté est l’inverse exact du monde de tolérance dont il est issu.
Hiérarchie et protocoles, racisme institutionnel, sexisme, sadisme... les
Azadiens cumulent les tares. Et c’est peut-être le défaut de l’ouvrage. Car si
avant cette confrontation le récit évoluait tout en subtilité, il tombe dans la
caricature de notre humanité contemporaine avec une exagération presque
grand-guignolesque. Difficile de faire fonctionner la suspension d’incrédulité
face à ces extraterrestres qui, en dehors du fait qu’ils soient divisés en
trois sexes, ressemblent bien trop aux humains actuels et passés. On ne peut
croire qu’une autre espèce ait-pu évoluer pour nous devenir à ce point
ressemblants. Il s’agit davantage d’une critique doucement parodique et
moralisante de notre société, qui détonne avec l’ambiance d’un space opéra qui
aurait pu par ailleurs apparaître cohérent.
En dehors de ce point, l'homme des jeux est un page turner. Son tour de force réside dans le fait que l’auteur
maintien l’intérêt pour une série d’affrontements autour d’un jeu dont le
lecteur ne connaîtra jamais la moindre règle, si ce n’est qu’il y a des cases,
des cartes et des pions. Et pourtant, chaque manche est chargée d’une tension
si bien décrite que l’on ne peut s’empêcher de poursuivre la lecture pour voir de
quelle manière Gurgeh remportera la partie, quelles seront les réactions de ses
adversaires, ou ce que prépare l’empereur Nicosar... La fin est presque abrupte
tant on a été immergé dans l’histoire.
L’homme des jeux est un roman
addictif au suspense haletant, qu’il est difficile de lâcher une fois entamé.
Il souffre pourtant de défauts, comme ce peuple extraterrestre amené comme une
satire de l’humanité, de manière trop démonstrative. Reste que l’ouvrage
préfigure pour le cycle de la Culture un univers d’un potentiel et d’une
richesse peu communs.
Categories:
- Avant 2010,
Science-Fiction,
Space opéra
Enregistrer un commentaire