Paru en France en 2013
Autres livres de Justine Niogret : Gueule de Truie, Mordre le bouclier

Après Gueule de Truie, Justine Niogret revient à la fantasy en revisitant la légende arthurienne. Avec Mordred, elle nous plonge dans le cœur du fils qu’Arthur aurait eu avec sa demi-sœur Morgause. Mordred, qui dans la légende finit par trahir et tuer Arthur, à la fois son oncle et son père.


Mais ici, point d’autres précisions sur la légende arthurienne. Pas de table ronde, quasiment aucun autre personnage que Mordred et son oncle. On ne sait rien de la géographie des lieux. Justine Niogret y évoque la guerre sans jamais nommer l’ennemi. Guenièvre est à peine entrevue. Les connaisseurs de la légende pourront établir des connexions, les autres se concentreront sur ce qu’est avant tout le roman : une introspection, une plongée dans les tourments.

Mordred a été blessé lors d’un tournoi. Dans son lit, dans la douleur, il se souvient de son enfance, de ses débuts au château. Avec sa plume toujours aussi fine et poétique, l’auteure évoque l’enfance auprès de Morgause, mi-sorcière mi-guérisseuse. Déjà, dans la simplicité de cette vie retirée dans une cabane de campagne, pointe la nostalgie, l’amertume habituelle des récits de Niogret.
Dans Mordred, toute beauté est déjà accompagnée d’une noirceur : le savoir que cela va disparaître.

Arthur vient chercher Mordred pour le former comme chevalier. Les souvenirs vont s’enchaîner, comme ce combat dans le noir contre l’Aspic, serpent géant qui manquera de tuer le garçon, ou le fameux tournoi qui blessera ses vertèbres.
Les personnages sont aussi peu nombreux que marquants. Arthur, mourant et bienveillant, plus homme que roi. Morgause en femme forte et fragile à la fois, et puis Polîk, ce garçon maléfique qui s’arrange pour que Mordred soit détesté. Polîk comme une version négative de Mordred, au point qu’on se demande s’il existe ailleurs que dans son esprit.

Mordred est un roman court et puissant. L’absence totale d’intrigue est déroutante, il ne s’agit que d’une succession de scènes qui dressent un tableau d’ensemble, mais sans aucun enjeu, sans attente. Etrangement, cela ne manque pas, les descriptions se suffisent. Toujours aussi noire et introspective, l’histoire évite néanmoins la surcharge de paraboles et de symbolisme que l’on trouvait dans Gueule de Truie. Mordred retourne à une simplicité crue.

Categories: ,