Je n’aurais sans-doute pas
acheté cet ouvrage de Glen Duncan sans avoir vu au préalable des commentaires positifs. Le titre et la couverture pouvaient faire craindre une bit-lit
commerciale pour ado. Il n’en est rien. L’auteur nous offre dans ce premier
volume une narration digne des meilleurs Anne Rice, ce qui pourrait surprendre
un amateur de romance gothique qui aurait acheté le bouquin par erreur.
Nous suivons Jake Marlowe, un
loup-garou de 200 ans qui pourrait être le dernier de son espèce. Plus grand
chose ne l’atteint, ni l’OMPPO, une organisation d’humains qui chassent les
phénomènes paranormaux et autres créatures (et qui rappelle vaguement le
Talamasca de Anne Rice), ni les vampires qui semblent le traquer pour d’autres
raisons que la seule animosité entre les deux espèces.
Aspirant plus ou moins à sa
propre mort, Jake va finalement se laisser embarquer contre son gré dans les
complots qui agitent tout ce petit underground.
Présenté ainsi, rien de très
nouveau. Le mythe du loup-garou est respecté (pleine lune, balles en argent,
tout y est), et quelques personnages secondaires sont un poil caricaturaux : l’ami
bibliothécaire, le chasseur de l’OMPPO en gothique cynique, la bourgeoise
française nymphomane...
"Le dégoût de soi absolu
apporte une sorte de paix"
Ce qui fait du dernier
loup-garou un roman exceptionnel, c’est cette plongée dans l’esprit du monstre.
Glen Duncan ne nous offre pas seulement une aventure racontée par Jake, mais
nous donne accès à chacune de ses pensées, de ses digressions multiples. Un
objet, une situation, lui rappellent un souvenir, qui en appelle un autre. Et
ses petites phrases qui décrivent la vie humaine avec le recul du désabusé font
mouche. Une telle justesse qui fait qu’on s’arrête parfois de lire pour se dire
« tiens c’est pas faux ça... ». Sans oublier ce second degré
permanent, quand Jake rappelle à quel point, dans une fiction, tout se
passerait autrement.
"Les jambes pâles,
enfantines, négligeables, flottant des deux côtés de Bragg en rut telles les antennes
d’un insecte égaré."
Si l’on ajoute à cela une belle
écriture au service de scènes d’action plutôt cinématographiques, quelques rebondissements
bien amenés même si convenus, des passages érotiques plutôt efficaces (avec un
soupçon de fan-service), l’ensemble est en forme de réussite.
Le dernier loup-garou est un
roman de divertissement dont la maîtrise de l’écriture et les multiples fulgurances
littéraires vont le placer nettement au-dessus du lot. Si le scénario n’a rien
de très complexe, c’est si bien écrit qu’on est totalement déculpabilisé de
lire un livre avec des vampires, des loup-garous et du sexe. Et que le roman
qui fait suite, Tallula, est déjà commandé. A voir maintenant si Glen Duncan
maintiendra le niveau dans ce qui devrait probablement être une trilogie.
Categories:
2012,
Bit-lit,
Fantastique
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